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LE BARRAGE A BOUES DE DOTE CEDE SOUS LA PRESSION DES EAUX

par CAMARA Abdoulaye Ciré, Bruxelles

publié dans Rusal-Friguia

Le barrage de Dötè
Pollution de mazout




Le mauvais sort s’acharnerait-il sur l’usine de Fria ? Oui si l’on énumère la liste des incidents qui commencent presque à devenir une habitude.

Pas plus tard que la deuxième semaine de ce mois (le 6 juillet exactement), nous faisions état dans nos colonnes d’une importante versade de soude caustique dans la nature. Presque l’équivalent d’un décomposeur (ces immenses cuves que l’on voit alignées en passant devant l’usine) soit plus de 1 000 M³ et une perte chiffrée à près de 1 millions de dollars.

Alors que les conclusions de l’enquête n’ont encore rien donné pour l’instant, deux autres incidents sont survenus la semaine dernière l’un dans l’usine, l’autre au niveau du barrage à boues de Dötè et cela pendant qu’une mission du Ministère de l’Environnement mène une enquête sur la pollution à la soude.

Le premier incident sans gravité mérite néanmoins qu’on s’y intéresse car il démontre la situation difficile dans laquelle se trouve l’usine depuis un certain temps. Lors du remplissage d’un bac à mazout au Groupe Energétique dans la nuit du 15 au 16 juillet, une défaillance du système de lecture du niveau a causé la versade de plusieurs dizaines de M³ de ce combustible dans les caniveaux et sur la route située entre les rails et les cheminées des chaudières. Comme c’est souvent le cas, le nettoyage ne permet pas de récupérer le mazout qui va déverser dans le chenal qui conduit vers Dötè. Mais il faut souligner que ce chenal est mal entretenu et il ne draine pas tout vers le barrage. Une partie redescend en contrebas vers Tigué Lakö pourrissant la vie des riverains.

Comme un malheur n’arrive jamais seul, une très forte pluie (la plus forte depuis le début de l’hivernage) est tombée dans la nuit de mercredi passé. D’une rare intensité, cette pluie a duré près de 3 heures et a très vite gonflé les eaux de ruissellement qui alimentent les cours d’eau.

Rappelons d’abord que le barrage de Dötè qui avait en partie cédé en 2007, n’avait pas été réaménagé depuis. Ce barrage en terre homogène, est constitué d’un massif en terre compactée et est utilisé pour retenir les boues que l’usine rejette. Il est construit avec des matériaux naturels collectés à proximité du barrage (terre argileuse, roche, pierre). En raison de l’instabilité de la plupart des matériaux terreux agglomérés, il est nécessaire que la base de ce type de barrage comporte d’abord une vidange qui permet d’évacuer le trop-plein qui risque de faire céder l’ouvrage et un déversoir. Lorsque le niveau normal du réservoir de retenue est atteint, le déversoir garantit le non-dépassement de ce niveau et laisse passer sans encombre les plus grosses crues. Il permet aussi de décanter les boues de l’usine au fond de la retenue et laisse l’eau non polluée rejoindre le cours du Konkouré.

Les travaux  réalisés par CGG en 2007 et qui avaient coûté plus de 2 millions de dollars n’avaient pris en compte ce fait. Ce qui a entraîné la rupture d’une partie de l’ouvrage. La rupture corrigeait de fait les défaillances des études et a permis de maintenir l’ouvrage en état de fonctionnement.

Cette année, malgré la crise maintes fois ressassée et les coupes drastiques de budget au détriment des installations, il a été décidé unilatéralement à Moscou de reprendre les travaux du barrage à hauteur d’une enveloppe de plus de 100 000 dollars. En 2003, un projet semblable qui devait être piloté par le centre de Vamy a été gelé car les études étaient très mal faites. Plus tard en 2007, le même projet a repris piloté cette fois par le très bouillant NABOKA de CGG. On connaît la suite.

Qualifiés d’inutiles, les rafistolages de cette année n’avaient pas leurs raisons d’être surtout en période de crise. Alors que les travaux n’étaient même pas arrivés à leur terme, la furie des eaux a eu raison de cet ouvrage mal fait causant une gigantesque pollution que les environnementalistes auront du mal à évaluer. Un vieil homme qui traverse le barrage tous les matins pour aller à son champ a failli être emporté par les eaux. Il s’en est tiré avec quelques contusions et actuellement hospitalisé.

100 000 dollars jetés à la poubelle alors qu’il y a des entretiens capitaux à effectuer sur l’usine, c’est du n’importe quoi et n’importe comment. Surtout que cet argent, au lieu de diminuer les impacts de l’usine sur l’environnement et les populations riveraines, contribue au phénomène inverse. A cause de la simple bêtise des quelques irresponsables.

D’habitude si prompte à commanditer une commission d’enquête sur les incidents, la Direction a tardé à réagir et à faire la lumière sur ce malheureux épisode. Il aura fallu un reportage jeudi 23 juillet de la chaine de télé satellite AFRICA 24 pour les pousser à sortir de leur silence par le biais d’un communiqué démentant l’ampleur de la pollution.

Ils y étaient bien obligés car la pression devenait forte sur eux et les mauvaises habitudes des gouvernements passés sont en train de changer. En plus, cela coïncidait avec la visite du Ministre de l’Environnement qui continue sa tournée dans les sites miniers du pays. Pour l’instant, il n’a fait aucune déclaration dans ce sens et sa visite des différents sites a pris fin samedi dernier.

Malheureusement, pendant ce temps, les populations continuent de subir les effets de cette pollution sans qu’aucune loi ne contraigne les pollueurs à réduire leurs émissions de déchets polluants et à prendre des mesures qui évitent des accidents de ce genre.

C’est vrai, j’allais l’oublier : c’est la crise. On ne dépense pas. Alors tant pis.


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Quand le barrage à boues de la Doté a été rehaussé en 1992-1993 le but visé était d'augmenter la capacité de retention du lac à boues de 10.000.000 m3.L'usine produisait à ce moment 1.000.000 m3 de boues par an.C'était donc claire que le lac pouvait contenir les boues rouge de l'usine pour encore maximalement 10 ans et pour la periode après une solution devait être préparé.Étant donné que la hateur du barrage était arrivé à sa maximum une autre solution de stockage des boues devait être envisagé, tel que le stockage à sec (dry stacking).si ceçi n'a pas été fait, ce n'est pas étonnant n'a pas tenu et q'il a laché en 2009(seize ans après la rehause du barrage).R.J.Gomperts, Ancièn Directeur de l'usine de Fria.
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